Livrets réglementés : les contrôles anti-doublon reportés à l’été 2027
L’entrée en vigueur des contrôles automatiques de multi-détention sur les livrets d’épargne réglementée est de nouveau repoussée.
Selon un décret publié au Journal officiel, l’obligation pour les banques de vérifier systématiquement qu’un client ne détient pas plusieurs Livret A, LDDS ou LEP n’entrera finalement en vigueur qu’en juillet 2027, contre janvier 2026 initialement prévu. Le gouvernement invoque des contraintes techniques persistantes.
Une règle connue, une application encore partielle
Le principe n’a rien de nouveau : il est interdit de posséder plusieurs livrets défiscalisés identiques, afin d’empêcher les épargnants de contourner les plafonds de dépôt. Depuis 2013, cette vérification est déjà obligatoire pour le Livret A lors de toute ouverture : la banque interroge l’administration fiscale pour s’assurer de l’absence de doublon.
En revanche, cette automatisation n’a jamais été généralisée aux autres produits réglementés, malgré un décret publié en 2021 visant à étendre le dispositif au LDDS, au LEP, mais aussi au PEL, au PEA et au Livret jeune.
Pourquoi ce nouveau report ?
Interrogé par l’AFP, le ministère de l’Économie – Bercy – explique ce décalage par une volonté « d’optimisation opérationnelle ». La mise en place d’un contrôle interbancaire automatisé suppose en effet des développements informatiques lourds : les banques ne peuvent pas échanger directement des données clients entre elles et doivent passer par l’administration fiscale, via une interface encore incomplète pour certains produits.
La Fédération bancaire française souligne de son côté que des contrôles existent déjà, parfois a posteriori, mais qu’ils ne sont ni automatiques ni exhaustifs.
Des sanctions déjà prévues
Ce report ne signifie pas pour autant une zone grise réglementaire. En cas de non-respect de l’interdiction de multi-détention, le Code général des impôts prévoit une amende minimale de 75 euros, pouvant aller jusqu’au remboursement intégral des intérêts perçus indûment. Le risque existe donc, même en l’absence de contrôle automatisé généralisé.
Les encours concernés sont considérables. En novembre, les ménages détenaient 438,9 milliards d’euros sur le Livret A, 161,8 milliards sur le LDDS et 80,9 milliards sur le LEP, ce dernier étant réservé aux ménages modestes sous conditions de revenus. Le taux du Livret A et du LDDS est fixé à 1,7 % depuis août, après plusieurs baisses consécutives.
Selon les projections, ce taux pourrait encore reculer à 1,5 % voire 1,4 % en février 2026, du fait du ralentissement de l’inflation intégré à la formule de calcul. Bercy conserve toutefois la possibilité d’un coup de pouce politique, comme par le passé, pour atténuer la baisse.
Un basculement progressif vers l’assurance-vie
Dans un contexte où les Français continuent d’épargner massivement – 18,7 % de leur revenu disponible, un niveau inédit depuis les années 1970 hors période Covid selon la Banque de France – l’épargne réglementée marque le pas. Depuis l’été, la baisse des taux favorise un déplacement des flux vers l’assurance-vie, dont les encours atteignaient 2 100 milliards d’euros fin octobre.
Le report des contrôles anti-doublon ne change donc pas l’équilibre global : il illustre surtout la difficulté persistante à harmoniser et automatiser la surveillance d’un système d’épargne réglementée devenu, par son ampleur, un enjeu opérationnel majeur pour les pouvoirs publics comme pour les banques.
